Les locomotives routières

Publié le par escarpades02.over-blog.com

La mise en place des matériels en fonte dure dans les deux casemates cuirassées du fort (plus de 50 tonnes pour chacune) nécessita une logistique énorme pour l'époque. Le transport de Saint-Chamond (département de la Loire) jusqu'à la gare de Crouy (près de Soissons) qui dut être aménagée pour l'occasion se fit par chemin de fer. De là, une locomotive routière tractait le matériel sur remorque jusqu'au secteur du fort.  cela nécessita 4 longs voyages pour chaque casemate (au total 10 à 20 jours pour chacune). Il fallait nettoyer les tubes encrassés de la chaudière à chaque voyage et certains passages étaient délicats, notamment la pente entre Chivres-Val et le fort.

La locomotive routière, parfois appelée locomobile, était l'ancêtre à vapeur du tracteur agricole. La révolution industrielle voyait en effet un profond bouleversement de l'outillage dans ce domaine.

Jean Renaud, dans son ouvrage "Un siècle de tracteurs agricoles: de la vapeur à l'électronique.", résume très bien cette transformation:

"Au dix-neuvième siècle, quelques pas ont été franchis pour motoriser certains travaux agricoles. Il s'agissait de tracter des matériels de travail du sol avec la force motrice disponible.

Dés 1834, une charrue à vapeur est présentée en Angleterre. En France, une piocheuse-défonceuse apparaît en 1853 animée par la vapeur comme la locomotive routière assurant le fonctionnement des treuils de labourage avec câble, en 1861."..."Tous ces systèmes funiculaires nécessitaient une mise en chantier longue et compliquée ainsi qu'une main-d'oeuvre abondante. Ils connurent un bien faible développement."..."A partir de 1870, la machine à vapeur animait les chantiers de battage. Des chevaux la déplaçait de ferme en ferme."

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"Les locomotives routières et les engins de traction auxquels elles ont donné naissance, furent les premiers appareils à labourer. Ils ont dominé la seconde moitié du dix-neuvième siècle."..."La locomotive routière, autonome pour les déplacements, était aussi utilisable pour tracter des charrues et autres appareils pour le travail du sol."..."Ces types de machines et leurs dérivés sous diverses formes ont été ensuite utilisés par des milliers d'agriculteurs américains et anglais. Leur diffusion en France a été restreinte car les petites structures agricoles ne permettaient pas de les accueillir. D'ailleurs, partout dans le monde, leur format important, leur poids élevé et leur mobilité restreintes étaient loin de convenir pour équiper les agriculteurs en toutes régions."

 

Les locomotives routières utilisées dans la réalisation des forts Séré de Rivières étaient généralement des engins des systèmes Cail ou Aveling & Porter.

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Description de la machine Aveling & Porter (de Rochester dans le Kent): "(...) c'est une voiture à cinq roues. La chaudière (...) est horizontale et porte à la fois sur les roues motrices placées à l'arrière et sur l'avant-train. Un double système d'engrenages lui permet de marcher à deux vitesses différentes: 3 à 4 kilomètres à l'heure en charge et 5 à 6 kilomètres à l'heure à vide. Elle n'a qu'un seul cylindre (...) horizontal et (...) placé à l'avant de la chaudière. Les roues motrices ont 1m,974 de diamètre et 0m,457 de largeur de jante. On a ménagé sur ces dernières des trous pour y placer au besoin des chevilles-crampons qui aident à passer sur les terrains mous. Les mouvements de rotation des deux roues motrices sont indépendants, ce qui facilite le passage des tournants très-courts. Un frein puissant se trouve sous la main du mécanicien et un pilote, placé sur l'avant-train formant tricycle, tient la tige directrice à l'aide de laquelle il oriente le disque d'avant. Celui-ci ne porte sur le sol que par son poids, et sa manœuvre est à ce point facile qu'un enfant peut en être chargé." (source: Les Merveilles de la locomotion, E.Deharme 1874)

Publié dans anecdotes historiques

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